L’année 2020 se termine dans quelques jours et, comme le veut la coutume, l’heure du bilan et des perspectives pour l’année qu’on entame a sonné. L’année 2020 était une année tumultueuse et houleuse sur tous les plans. Une année extrêmement difficile pour la Tunisie, où la crise sanitaire sans précédent de la pandémie de Covid-19 a impacté négativement la situation économique et sociale en plus de la crise politique gouvernementale. 2020 s’achèvera bientôt laissant, certainement, des séquelles sur celle que nous entamerons.
Nous avons vécu des événements sociétaux inquiétants. L’injustice sociale continue à sévir. Des jeunes en perte de repères. Des libertés individuelles bafouées. La pauvreté prend des proportions sidérantes. Le chômage grimpe. L’insécurité devient effarante. La santé est malade. L’économie nationale à l’agonie. Des crises à la pelle et de la pire espèce s’installent dans la durée, ce que les chiffres confirment !
La crise socioéconomique et politique croît comme un tentacule, menaçant et bouleversant notre vie quotidienne, secouant nos certitudes en l’avenir. D’une année à l’autre, la situation postrévolutionnaire devient de plus en plus critique, car la perte de confiance a des conséquences fâcheuses puisqu’elle gangrène tout et sape le moral des citoyens qui estiment qu’ils n’ont plus rien à perdre et lorgnent l’ailleurs, prometteur d’un avenir meilleur.
Ce ne sont plus uniquement les jeunes qui quittent le pays. Le stand-by d’une période indéterminée et interminable a fini par générer chez eux le désarroi et la démission. Aussi, même des entrepreneurs et des hommes d’affaires, en quête de climat sain et sûr pour leurs projets, ont choisi d’investir à l’étranger.
Sûrement, c’était l’une des années les plus difficiles, nous nous sommes dressés les uns contre les autres pour s’entredéchirer parfois à belles dents, comme si plus rien ne nous liait et que nous n’avions plus d’autre objectif que de nous haïr.
Le malaise social est devenu la règle, nourri par une baisse du pouvoir d’achat, des déséquilibres économiques et sociaux, des services publics défaillants, un faible taux de création d’emplois au moment où le nombre de personnes en chômage augmente sensiblement, un manque de confiance en le gouvernement, l’incivisme, la pression fiscale, le recours coûteux aux prestations sanitaires. Ce qui montre la défiance des citoyens envers les politiques nationales et dépeint une société craintive, angoissée et fragmentée, alors que la Tunisie se retrouve face à des défis majeurs. Le désenchantement a succédé aux illusions qui ont été vendues aux citoyens.
Tout cela ne peut que creuser plus le fossé, raviver davantage la grogne sociale et attiser le feu de l’exaspération populaire, notamment chez les jeunes, en prise directe, qui n’attendent que la première occasion pour protester.
Les Tunisiens vivent aujourd’hui une crise de confiance en leurs institutions. Le manque de fiabilité, de transparence, de crédibilité des politiques a déstabilisé l’ensemble de la société et a donné lieu à une crise extrêmement grave. En effet, les citoyens sont en état de suspicion totale, non seulement à l’égard des représentants politiques, dont le discours et les promesses n’ont plus de crédibilité, mais également à l’égard de tous ceux qui prétendent s’exprimer en leur lieu et place : les syndicats, les acteurs économiques, les hommes politiques… Les dirigeants politiques, toutes tendances confondues, les syndicats et les chefs d’entreprise, les services publics … ne suscitent plus que scepticisme et méfiance. Il en ressort que même les statistiques nationales, les données chiffrées et les analyses des indicateurs produites par certaines institutions perdent de leur crédibilité face au doute croissant de la population.
Comment continuer à avoir confiance en des discours et des politiques ? Qu’éprouvent les citoyens en pensant à la politique ? De la méfiance. Mais ce qui est encore plus désolant est que le manque de confiance s’étend presque à tous les domaines. Aujourd’hui, force est de constater que plusieurs secteurs vitaux qui impactent directement le quotidien des Tunisiens sont en panne.
Dix ans après la révolution, les Tunisiens brandissent encore leur mécontentement de la gouvernance du pays, manifestant leur inquiétude quant à l’avenir, et estimant que les efforts du gouvernement pour lutter contre la corruption, les conflits d’intérêts, le terrorisme, la violence… ne sont qu’un coup d’épée dans l’eau.
Aucun grand projet national n’a été réalisé pour que nos concitoyens retrouvent pleinement leur dignité. Aucun parti politique ne semble se préoccuper sérieusement de la situation socioéconomique dramatique des populations dans les régions intérieures du pays, dont on puise quotidiennement des images sordides offrant un visage terne du pays.
Nous entamerons ainsi 2021 avec des enjeux encore plus importants pour tout le pays. On ne peut entrevoir une année positive du point de vue politique et économique, malgré la morosité régnante, du moral bas des ménages et des chefs d’entreprise, que lorsque le gouvernement s’engage fermement à repenser et redéfinir au mieux les priorités et à établir une feuille de route plus claire, avec des membres du gouvernement qui seront les pilotes réels des grands chantiers, notamment la diplomatie, l’agriculture, l’Industrie, l’économie et les finances, le développement…